Morphologie des araignées

 Le céphalothorax et ses appendices

 L'abdomen et ses appendices


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Le céphalothorax et ses appendices

La partie antérieure du corps de l'araignée est le résultat de la fusion de la tête («Céphalo») et du tronc («thorax»).

Tous les appendices, à l'exception des filières, du colulus et du tubercule anal, en sont issus.

Deux plaques fortement sclérotisées protègent les organes vitaux (systèmes nerveux, digestif).

Dorsalement, le tergite, ou simplement bouclier dorsal (c'est la plaque que l'on nomme improprement céphalothorax dans les descriptions taxonomiques), est percé de trous en avant pour laisser le passage aux nerfs optiques ; intérieurement, l'apodème médio-dorsal est une forte crête, visible à l'extérieur sous forme d'une dépression médiane, la fovéa ou fovea media (transverse ou longitudinale suivant les familles) sur laquelle s'insère le puissant muscle dilatateur dorsal du jabot aspirateur ; les autres apodèmes sont plus faibles et dessinent des stries rayonnantes souvent soulignées par la coloration.

On distingue une partie antérieure du céphalothorax, dite partie céphalique, et une partie postérieure, dite partie thoracique, séparées par deux sillons.

Les yeux, au nombre de huit chez la majorité des familles mais parfois réduits au nombre de six (voir même de zéro chez certaines familles cavernicoles) sont nommés suivant leur position relative sur deux lignes (cette nomenclature, artificielle, n'a d'autre but que descriptif) :

Ventralement, le sternite, ou simplement sternum, a ses bords latéraux échancrés au niveau de l'insertion des pattes locomotrices ; il se prolonge ou non, suivant les familles, vers l'arrière entre les hanches des dernières pattes, et/ou se soude, à l'avant, à la petite pièce sclérotisée dite pièce labiale appartenant au segment des pattes-mâchoires.

Dans plusieurs familles, les décorations du sternum sont des indications précieuses pour l'identification des espèces.

Tout à l'avant du corps, la bouche, très étroite, est peu apparente ; elle est surmontée du rostre et la pièce labiale la limite en dessous ; les hanches (c'est-à-dire le premier article) des pattes-mâchoires sont dilatées en forme de lame chez tous les membres du sous-ordre des Aranéomorphes et chez quelques Mygalomorphes ; ces lames maxillaires portent une ligne de petites dents sclérotisées à leur bord antéro-externe, la serrula, et une touffe de soies villeuses à leur bord interne, la scopula.

Les appendices les plus remarquables, caractéristiques des Arachnides, restent les chélicères, petites pinces spécialisées en organe inoculateur de venin chez les Araignées (elles se présentent un peu comme des pinces à une seule partie mobile, aiguë et creuse : le crochet).

L'orientation des chélicères par rapport au céphalothorax permet de reconnaître les sous-ordres des Araneae :

Le crochet articulé de chaque chélicère est plié, au repos, dans une rainure de la base.

Cette rainure est bordée ou non de denticules et de pointes dont la disposition, le nombre et l'aspect a une certaine importance taxinomique.

Il faut alors distinguer la marge interne, orientée vers l'espace séparant les chélicères, et la marge externe orientée vers «l'extérieur» de la chélicère.

Les mygales terricoles des familles des Ctenizidae et des Nemesiidae possèdent un «râteau», dit rastellum, à l'extrémité de la base des chélicères, juste devant l'articulation du crochet. Cette série de fortes pointes sclérotisées très résistantes sert à piocher le terrain choisi pour forer le terrier.

De part et d'autre des chélicères, on observe une paire de petites pattes inutilisées lors des déplacements : les pédipalpes ou pattes-mâchoires. Elles ont à l'origine une structure semblable à celle des autres pattes, mais elles ne comptent que six articles au lieu de sept (l'article terminal, le tarse, est le résultat de la fusion du tarse et du métatarse primitifs). Elles sont d'ailleurs très proches d'aspect des pattes ambulatoires dans les familles les plus primitives des Ctenizidae, Nemesiidae et Filistatidae, bien qu'elles n'aient pas le même usage. En effet, ces pattes-mâchoires sont spécialisées en organes sensoriels, en organes alimentaires et, surtout, en organes copulateurs mâles (ce qui ne se retrouve chez aucun autre groupe animal).

Les pattes ambulatoires (ou locomotrices), au nombre de quatre paires et numérotées de l'avant vers l'arrière de I à IV, sont constituées de sept articles, à savoir, de leur insertion (à la marge du sternum) à leur extrémité :

la hanche (rarement encore appelée coxa),

le trochanter,

le fémur (généralement, cet article est le plus long),

la patella,

le tibia,

le métatarse (rarement encore appelée basitarse),

le tarse (qui peut être considérablement allongé et muni de fausses articulations le rendant très flexible chez les Pholcidae).

Elles peuvent porter des épines (grosses soies rigides quelque peu mobiles sur leur base), parfois fortes chez certaines espèces (du genre Oxyopes par exemple).

La disposition des épines est utilisée en taxinomie, et pour s'y retrouver dans les descriptions il faut connaître le vocabulaire décrivant leur position sur les articles :

Les araignées capturant leurs proies en les saisissant «à bras le corps», sans intervention de la soie (familles des Clubionidae, des Thomisidae, des Salticidae) ont souvent, sous les articles terminaux des pattes I (parfois aussi des II) une série d'épines particulièrement fortes, obliques, destinées à retenir les victimes le temps de leur infliger une morsure.

Parfois, ces pattes de type «ravisseuses» sont considérablement plus fortes que les autres : la famille des Thomisidae illustre particulièrement bien cette adaptation.

Les Araignées dites cribellates filent une soie très particulière, émise par des filières spécialisées (le cribellum) et étirée par un ou deux peignes de soies rigides, courbes et égales portés à l'extrémité du métatarse IV, sur son bord supérieur : le calamistrum.

Le sexe influe aussi sur l'aspect des pattes : outre le fait que la majorité des mâles les ont proportionnellement plus longues que les femelles, certaines espèces à la vue bien développée (Lycosidae, Salticidae) ont développé des caractères sexuels secondaires tels que rangées de soies colorées, déformations, renflements

L'extrémité du tarse porte deux ou trois griffes, cette dernière possibilité caractérisant les Araignées se déplaçant sur des toiles.

Le plus souvent, les araignées Aranéomorphes dionychées (portant deux griffes) ont aussi une paire de touffes denses de soies villeuses au-dessous des griffes et les cachant : les fascicules unguéaux, pouvant se prolonger en deux bandes latérales sous tout le métatarse : les scopulas.

Ces formations soyeuses sont destinées à rendre possibles les déplacements sur des surfaces lisses, la finesse des villosités permettant l'adhérence par capillarité à la fine couche d'eau recouvrant presque tous les objets.

Enfin, les pattes sont porteuses de différents organes sensoriels : lyrifissures, trichobotries... On trouvera plus loin la description détaillée des organes sensoriels.

Certaines espèces dites myrmécomorphes (c'est-à-dire semblables à des fourmis, par exemple les genres Myrmarachne ou Leptorchestes de la famille des Salticidae) vont d'ailleurs jusqu'à se servir de leurs pattes I comme les fourmis se servent de leurs antennes : ces pattes sont tenues dans l'axe du corps, vers l'avant, et agitées sans cesse de mouvements imitant à la perfection ceux des véritables antennes d'insectes à la recherche d'informations chimiques ou tactiles.

 
L'abdomen et ses appendices

La partie postérieure du corps de l'araignée, l'opisthosoma, se dénomme plus couramment abdomen par analogie avec l'abdomen d'autres animaux qui, eux aussi, contiennent les organes internes tels que le coeur et les vaisseaux sanguins, les poumons et/ou les trachées, la partie terminale du tube digestif, l'organe excréteur, les gonades, et enfin les glandes sécrétrices de soie, dites séricigènes, particulières, elles, aux araignées.

La forme générale de l'abdomen est celle d'un sac souple et extensible, plissé visiblement chez quelques familles (Thomisidae en particulier), microscopiquement chez toutes.

Il est très vulnérable : aucune plaque sclérotisée ne le protège, sauf exception (la famille d'Asie tropicale des Liphiistidae présente une segmentation abdominale nette, archaïque, avec des pleurites et sternites sclérotisés ; les mâles de certaines familles, comme les Oonopidae, ont un tergite et un sternite rudimentaires, dénommés scutums ; des points circulaires indurés, placés par paire sur la face dorsale et signalant les insertions musculaires, peuvent être plus ou moins développés (ce sont les petits boutons noirs de nombreuses Argiopidae), jusqu'à rendre tout l'abdomen dur chez les Gasteracantha tropicales ou les Cyrtarachne de Méditerranée (famille des Argiopidae) : se sont les sigilles.

Une autre induration, minuscule, est constituée par une plaque dentée à l'avant de l'abdomen des mâles de Theridiidae. Elle représente la partie mobile de leur organe stridulatoire : cette partie vient frotter une série de stries de la face postérieure du céphalothorax, produisant un son destiné à annoncer le mâle à la femelle.

Les filières, qui affectent la forme de tubes biarticulés plus ou moins coniques et mobiles à l'extrémité de l'abdomen (elles peuvent rarement être déportées vers son milieu), dérivent des appendices des quatrième et cinquième anneaux de l'ophistosome.

L'aspect des filières a aussi une importance en systématique, mais surtout au niveau de la famille ou du genre.

Les araignées dites cribellates se reconnaissent à la présence d'une filière très particulière, le cribellum, en forme de plaque criblée de milliers de perforations (les fusules) émettant la soie qui est littéralement peignée et étirée à sa sortie par le calamistrum du métatarse des pattes IV.
Cette plaque peut être divisée en deux ou non.

Dans les filières tubulaires habituelles, les fusules sont situées à l'extrémité du dernier article et sont différentes d'aspect (microscopiquement) suivant la qualité de la soie émise par la glande séricigène en relation.

Classiquement, on arrive à reconnaître six types de glandes séricigènes, mais neuf au moins sont décrites depuis l'avènement des techniques modernes de microscopie (microscopie électronique à balayage ou à transmission en particulier).

Les filières sont mobiles grâce à leur musculature comparable à celle des pattes.

Dans les descriptions des filières, nécessaires pour identifier certaines familles ou certains genres, sont distinguées de l'avant du corps à l'arrière :

Le nombre de filières était donc primitivement de huit, mais les Mygalomorphes n'en comptent plus que six, quatre ou même deux et les Aranéomorphes cribellates six plus un cribellum, les Aranéomorphes écribellates six, quatre ou deux.

Le tubercule anal, mentionné ci-dessus, est un mamelon souvent discret (il atteint son maximum de volume chez les Urocteidae et les Oecobiidae sur notre zone d'étude, et en outre arbore une couronne de longues soies en pinceau pouvant s'étaler en couronne : originale !).

À sa base débouche l'anus par où sont expulsés les excréments qui se présentent comme des boulettes foncées (les résidus digestifs) entourées de guanine blanche.

L'épiderme de l'abdomen, parfois glabre mais souvent très soyeux, porte une variété d'organes sensoriels ainsi que, chez les mygales tropicales de la famille de Teraphosidae, des zones couvertes de soies urticantes activement projetées à la face de l'agresseur par un brossage vigoureux des pattes postérieures.

Comme cela a déjà été dit, certains mâles d'araignées portent, en avant de la face dorsale de l'abdomen et en regard d'une formation analogue du céphalothorax, une plaque sclérotisée évoquant une râpe. Le frottement de ces deux zones d'aspérités l'une sur l'autre est source d'un son utilisé par le mâle au cours de la parade sexuelle. Dans de rares cas, ce son peut être audible (cas des grosses mygales tropicales émettant sur une fréquence de 1000 hertz environ).