La reproduction

Au premier tiers de la face ventrale de l'abdomen on peut voir un repli transverse de l'épiderme : le pli épigastrique. L'orifice génital y débouche.

Chez les femelles, cet orifice peut être simple et indiscernable (groupe des araignées haplogynes), ou entouré d'une formation sclérotisée plus ou moins complexe, l'épigyne, n'apparaissant qu'une fois la maturité sexuelle atteinte (groupe des araignées entélégynes).

La structure de cet épigyne, observable uniquement avec une bonne loupe binoculaire voir même un microscope, est très utilisée pour la détermination au niveau spécifique.


Femelle adulte d'Argiope lobata, à l'abdomen distendu par les ovaires dévellopés prêt à remplir les cocons succésifs. Ajaccio, 1999.

Les gonades sont internes à l'abdomen, chez les mâles comme chez les femelles. Celles-ci voient le développement des ovaires gonfler leur abdomen, qui semble presque sur le point de craquer sous la pression des centaines ou des milliers d'ovules qui se développent à l'approche de la ponte.
Le canal spermatique débouche évidement au niveau du pli épigastrique. Il n'existe aucun organe copulatoire associé aux testicules.

       


Détail d'un bulbe de la mygale Cteniza sauvagesi : il est simple, en forme de poire effilée, et se dresse près de la base du tarse. Bastia, 1996.

Les Arachnides autres que les Araignées sécrètent une enveloppe gélatineuse contenant le sperme (le spermatophore), puis doivent guider la femelle afin que son orifice génital, lui aussi situé sous l'abdomen, vienne en contact avec ce réservoir temporaire de sperme, s'y fixe et pompe son contenu (certains Arachnides ne guident pas la femelle mais déposent leurs spermatophores simplement à proximité).

Les Aranéides ont modifié notablement ce processus : le mâle tisse une petite toile dite toile spermatique (elle consiste en un petit ouvrage rectangulaire ou triangulaire tissé sur le substrat), y dépose une goutte de sperme, puis la pompe avec la pointe de ses deux bulbes copulatoires (probablement dérivé d'une des griffes du tarse du pédipalpe) dans un canal en cul-de-sac enroulé en spirale, le spermophore. Ce bulbe peut être simple, terminal et partiellement inclus dans le tarse (Filistatidae), ou externe et infère après l'allongement du tarse.

On distingue alors, suivant la complexité du bulbe, les araignées à bulbe simple, en poire prolongée par une pointe, dressé près de la base du tarse (Mygales et araignées haplogynes : Segestriidae, Dysderidae) et les araignées entélégynes à bulbe plaqué au repos dans une alvéole creusée dans le tarse (qui se nomme alors cymbium tant qu'il est simple, mais dans les familles comme les Argiopidae et quelques-autres il se divise en deux branches : la principale reste nommée cymbium, la secondaire, plus petite, paracymbium).

Les bulbes des entélégynes ont des structures complexes et caractéristiques, dont la description est fondamentale en taxinomie au niveau spécifique. Ceux des haplogynes sont parfois aussi utilisables, mais les différences, légères, sont souvent difficiles à observer.

 
Détail du bulbe, vue de face, d'une araignée entélégyne, Amaurobius ferox. Ce bulbe est complexe, avec des pointes dont la disposition est caractéristique à chaque espèce. Poghju di Venacu, 1993.


Accouplement de deux petites araignées sauteuses du genre Euophrys (le mâle est dessus, tête-bèche avec la femelle). Viscuvatu, 1999.

Aidez-nous à les identifer !

L'accouplement est un moment de grand danger pour les mâles, qui doivent réussir à inhiber le réflexe prédateur des femelles.
Les comportements de cour sont très variés, pas toujours bien connus car les sens qui interviennent dans la reconnaissance des sexes chez les araignées sont bien souvent très éloignés des nôtres. On peut cependant citer la classification succincte suivante :

  • Les danses nuptiales, observées chez les araignées à vue bien développée comme les Salticidae et les Lycosidae, consistent en des mouvements très codifiés des pattes et/ou du corps des mâles qui portent souvent des couleurs contrastées. Ces mouvements peuvent être si rapides que les appendices en deviennent invisibles et que le son en émanant nous est audible.
  • Les parades sonores sont le fait des araignées disposant d'un organe stridulatoire, comme certains Mygalomorphes, Theridiidae ou encore capables de faire vibrer une partie de son corps, l'abdomen par exemple chez les Anyphaenidae. Les sons produits sont rarement audibles à l'oreille humaine, sauf chez les plus grosses Mygales tropicales.
  • Les parades vibratiles font intervenir des vibrations d'un milieu autre que l'air. Très répandues chez les araignées sédentaires, elles consistent alors en des pincements rythmés des fils du cadre de la toile de la femelle par le mâle qui annonce ainsi son identité.
  • Les parades tactiles sont surtout répandues chez les araignées errantes n'ayant pas une vue développée. Elles consistent de la part du mâle en attouchements, caresses, déambulations sur le corps de la femelle souvent plus grosse que lui, jusqu'à ce qu'il «sente» sont acceptation de l'accouplement.
  • Les parades olfactives ne sont que soupçonnées, les molécules odorantes de type phéromones entrant en jeu restant très difficiles à analyser, du fait même des quantités infimes sécrétées. Il est très probable que les mâles trouvent leur partenaire en suivant des pistes phéromonales, soit aériennes soit le long du fil de soie que toute araignée laisse derrière elle au cours de ces déplacements.
  • Les parades «alimentaires», surtout visibles chez des araignées tisseuses de toiles, consistent en l'attente par le mâle de la capture d'une proie par la femelle qui, pendant qu'elle s'en nourrit, a son attention détournée et peut ainsi se faire féconder.

    Une parade exceptionnelle est à placer ici : le mâle de Pisaura mirabilis (Clerck) offre à la femelle une proie qu'il a lui-même préalablement capturée et soigneusement emballé de soie (de la complexité de l'emballage tient sa survie : plus il est important, plus le repas dure longtemps et plus ses chances de fuite sont grandes). Le gaspillage n'étant pas de mise chez les Araignées, le mâle ne trouvant pas de partenaire à la fin de la journée dévorera lui-même le «cadeau».
  • L'absence de parade parfois constatée, qu'elle soit «la règle» pour une espèce ou l'exception pour une autre, tient très probablement à une méconnaissance des processus de communication impliqués plutôt qu'à une véritable absence de communication.
       



L'agélénide Textris coarctata monte la garde près de ses cocon fixés sous un cartons au bord d'un chemin. Les sacs blancs sont lestés de petits cailloux retenus par une fine épaisseur de soie.
Bastia, 1997.


La mère Philodromus bistigma surveille ses oeufs, simplement déposés dans une coupe de soie sous une pierre. Une couverture les recouvrait mais a été déchirée en soulevant la pierre.
Lucciana, 1996.


Dérangée sous sa pierre, cette mère Oxyptila sp. roule son cocon pillulaire pour le remettre à l'abri.
San Pedrone, 2000.


La mère Dolomedes fimbriatus transporte son cocon dans ses chélicères. Peu de prédateurs viennent s'y frotter...
Broncole, 1998.


Au fond de son terrier, la mère d'Eresus niger tricolor garde son cocon plaqué sous son sternum.
Vizzavona, 2000.


Cocon pédonculé d'une Ero sp., placé sous une pierre.
Pozzu di Brandu, 1996.


Extraordinaire par sa forme, le cocon de l'Argyrodes gibbosus ne peut être confondu avec aucun autre. Il est placé dans la toile de l'araignée-hôte, ici une épeire des cactus.
Borgo, 1998.



Ces deux sphères sont les cocons d'une veuve-noire, Latrodectus mactans tredecimguttatus. La petite araignée qui y déambule est la kleptocommensale Argyrodes gibbosus.
Bunifaziu, 1999.

Les cocons sont de multiples sortes.

Tous les stades de complexité sont rencontrés, depuis les quelques fils entourant les oeufs des Pholcidae jusqu'aux sacs à multiples couches protectrices des argiopes.

Leur forme est des plus variable : sphérique, discoïde, hémisphérique, en «montgolfière», en «bourse», en fuseau, en poire...

Certaines espèces se reconnaissent à la seule vue de leur cocon.

Certains sont fixés au substrat par une face (nombreuses Argiopidae, Zelotes, certaines tégénaires), d'autres sont suspendus à un filament (Leptonetidae, certaines tégénaires, Mimetidae), d'autres encore sont transportés par la femelle, soit dans ses chélicères (Scytodidae, Pisauridae, Pholcidae), soit fixés à ses filières (Lycosidae), soit encore maintenus par les premières pattes sous son sternum (Eresidae).

Plusieurs qualités de soie interviennent dans l'élaboration des cocons à couches multiples :

  • soie papyracée hydrofuge pour la couche la plus externe des cocons d'argiopes,
  • bourre floconneuse isolante,
  • matelas moelleux...

Souvent, des particules de terre ou des débris végétaux sont inclus dans la dernière épaisseur, assurant un remarquable camouflage.

La couleur des cocons enfin est des plus variables : blanc, brun, verdâtre, orange ou même bleu en sont des exemples.


Très commune dans nos maisons, l'Holocnemus pluchei garde son cocon, limité à quelques fils, dans ses chélicères.
Poghju di Venacu, 1993.